Deux poèmes célèbres sur le thème amour.
Poème d'amour:
L'Amour et la Folie
Tout est mystère dans l'amour
Ses flèches son carquois son flambeau son enfance:
Ce n'est pas l'ouvrage d'un jour
Que d'épuiser cette science.
Je ne prétends donc point tout expliquer ici:
Mon but est seulement de dire à ma manière
Comment l'aveugle que voici
(C'est un dieu) comment dis-je il perdit la lumière
Quelle suite eut ce mal qui peut-être est un bien;
J'en fais juge un amant et ne décide rien.
La Folie et l'Amour jouaient un jour ensemble:
Celui-ci n'était pas encor privé des yeux.
Une dispute vint: l'Amour veut qu'on assemble
Là-dessus le conseil des dieux;
L'autre n'eut pas la patience;
Elle lui donne un coup si furieux
Qu'il en perd la clarté des cieux.
Vénus en demande vengeance.
Femme et mère il suffit pour juger de ses cris:
Les dieux en furent étourdis
Et Jupiter et Némésis
Et les juges d'enfer enfin toute la bande.
Elle représenta l'énormité du cas:
" Son fils sans un bâton ne pouvait faire un pas:
Nulle peine n'était pour ce crime assez grande:
Le dommage devait être aussi réparé."
Quand on eut bien considéré
L'intérêt du public celui de la partie
Le résultat enfin de la suprême cour
Fut de condamner la Folie
A servir de guide à l'Amour.
Jean de la Fontaine
Poème d'amour:
Rendez-vous
Dans la chambre encore fatale
De l’encor fatale maison
Où la raison et la morale
Se tiennent plus que de raison
Il semble attendre la venue
À quoi misère il ne croit pas
De quelque présence connue
Et murmure entre haut et bas :
« Ta voix claironne dans mon âme
Et tes yeux flambent dans mon coeur.
Le Monde dit que c’est infâme
Mais que me fait ô mon vainqueur ?
J’ai la tristesse et j’ai la joie
Et j’ai l'amour encore un coup
L’amour ricaneur qui larmoie
Ô toi beau comme un petit loup !
Tu vins à moi gamin farouche
C’est toi joliesse et bagout
Rusé du corps et de la bouche
Qui me violente dans tout
Mon scrupule envers ton extrême
Jeunesse et ton enfance mal
Encore débrouillée et même
Presque dans tout mon animal
Deux trois ans sont passés à peine
Suffisants pour viriliser
Ta fleur d’alors et ton haleine
Encore prompte à s’épuiser
Quel rude gaillard tu dois être
Et que les instants seraient bons
Si tu pouvais venir ! Mais traître
Tu promets tu dis : J’en réponds
Tu jures le ciel et la terre
Puis tu rates les rendez-vous...
Ah ! cette fois viens ! Obtempère
À mes désirs qui tournent fous.
Je t’attends comme le Messie
Arrive tombe dans mes bras ;
Une rare fête choisie
Te guette arrive tu verras ! »
Du phosphore en ses yeux s’allume
Et sa lèvre au souris pervers
S’agace aux barbes de la plume
Qu’il tient pour écrire ces vers…
Paul Verlaine
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire